On marche dans l’automne
- Publié le Mercredi 26 janvier 2011
- par Serval
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Traversée Nord-Sud, étape n°16 : Ons-en-Bray -> Gisors (mercredi 13 octobre 2010)
Vous pouvez aussi voir ici la liste de toutes les étapes de la Traversée Nord-Sud.
Les mûres disparaissent à toute vitesse, elles se dessèchent presque à vue d’oeil. Sans doute à cause du froid un peu vif des deux dernières nuits, elles se sont ratatinées. Les cenelles et les cynorrhodons eux aussi sont flétris, leur peau hier luisante est maintenant terne et fanée. Les prunelles résistent à peine mieux ; seule leur pruine sauve les apparences. Deux journées ont suffi. Ça y est, c’est l’automne.
Il fait très beau pourtant. Dans la forêt de Thelle, le chemin semble tracé juste pour le plaisir de s’enfoncer entre deux rangées de fougères dorées que la lumière du matin fait briller.
« Tout l’automne à la fin n’est plus qu’une tisane froide », écrivait Francis Ponge. Mais il y a juste avant quelques jours à cueillir. Bien sûr, on n’ose plus parler d’été indien. Bien sûr, on se résigne à revenir aux pluies qui glissent vers l’hiver, si doucement. Dans les jardins déjà presque nus, quelques dalhias, quelques cosmos posent encore des taches mauves ou roses, à peine délavées. Mais la forêt a gardé toute sa lumière. Elle vient du sol ; on marche dans l’automne. » Philippe Delerm — Les chemins nous inventent (Stock, 1997) |
Cette lumière qui filtre à travers le feuillage joue sur l’écorce des arbres et dessine des ombres dans le sous-bois ; elle fait miroiter pour quelques dernières secondes les feuilles jaunes que chaque nouveau souffle de vent fait tomber lentement, en virevoltant, jusqu’à atteindre le lit des milliers d’autres feuilles qui tapissent le sol.
Les ronces piquent du nez, mais le houx surgit de toutes parts. Lui que je n’avais pas encore remarqué étale avec orgueil ses belles feuilles vertes et pointues et ses baies rouges. Premier signe d’un Noël encore loin pourtant. Reconnaissance surtout — on ne peut plus la nier — de la mort de l’été.